Nous avons eu le privilège d’interviewer le professeur Djennane Malik, médecin-chef du service de rhumatologie au CHU de Tizi Ouzou, afin de discuter des enjeux actuels en matière de santé rhumatologique. Dans cet entretien, il nous livre son expertise sur la prise en charge des maladies rhumatologiques, notamment l’arthrose et la polyarthrite rhumatoïde, et partage des conseils précieux pour prévenir ces pathologies au quotidien. Un éclairage essentiel de la part d’un professionnel engagé dans le domaine de la rhumatologie.
Quels sont les premiers signes d’alerte des maladies rhumatologiques, comme l’arthrose ou la polyarthrite rhumatoïde, et quand faut-il consulter ?
Les maladies rhumatologiques, comme l’arthrose et la polyarthrite rhumatoïde, présentent, à leurs débuts, des symptômes similaires qui nécessitent une attention particulière. Les premiers signes d’alerte incluent des douleurs articulaires persistantes, un gonflement au niveau des articulations, une limitation des mouvements, ainsi qu’une rougeur accompagnée d’une sensation de chaleur dans la zone touchée. Les douleurs peuvent également se manifester lors de la mise en charge des articulations portantes telles que les hanches, les genoux et les chevilles. Face à l’apparition de ces symptômes, il est essentiel de consulter un médecin sans tarder afin de permettre un diagnostic précoce et une prise en charge adaptée, dans le but de limiter la progression de la maladie et d’améliorer la qualité de vie du patient.
Quels conseils donnez-vous pour prévenir les troubles musculo-squelettiques liés au mode de vie, comme le mal de dos ?
Pour prévenir les troubles musculo-squelettiques liés au mode de vie, comme le mal de dos, commencez votre journée par des échauffements. Rien de tel que de petits exercices pour débuter en douceur : faites des rotations avec votre bassin, des moulinets avec vos bras, tournez vos poignets doucement dans tous les sens, étirez vos mains et massez-les lentement. Ensuite, étirez-vous plusieurs fois au cours de la journée. Levez-vous, placez les bras au-dessus de votre tête comme pour atteindre le plafond et étirez-vous. Profitez-en pour faire bouger vos articulations, faire tourner doucement votre tête de gauche à droite et de haut en bas.
En cas de tensions dans les épaules ou le dos, pratiquez des mouvements doux et des automassages pour les dénouer. Prévoyez également une courte pause une fois par heure. Faites quelques pas, mettez-vous à la fenêtre, sortez prendre l’air ou échangez quelques mots avec votre entourage. Vous pouvez aussi opter pour une petite sieste durant l’une de ces pauses.
Adaptez la hauteur de votre mobilier pour éviter les mauvaises postures. Par exemple, si vous êtes assis, vos coudes doivent être à la même hauteur que les accoudoirs de votre chaise et de votre bureau. Ne croisez pas les jambes, posez vos pieds bien à plat sur le sol et veillez à maintenir votre dos droit. Réglez également la position et la hauteur de votre écran : celui-ci doit être à la même hauteur que vos yeux pour éviter de baisser ou lever la tête, ce qui occasionne des douleurs à la longue.
Enfin, pratiquez une activité physique régulière. Un sport régulier, de la marche ou du vélo sont autant de moyens de renforcer la masse musculaire, de gagner en endurance et de limiter les risques de troubles musculo-squelettiques.
Comment les nouvelles avancées médicales, comme les biothérapies, ont-elles transformé la prise en charge des maladies inflammatoires chroniques ?
Hormis l’utilisation historique des sels d’or, les seuls traitements dits de fond utilisés jusqu’en 2000 étaient des médicaments chimiques : méthotrexate, sulfasalazine, D-pénicillamine, hydroxychloroquine, léflunomide et corticoïdes. Le méthotrexate, le plus efficace d’entre eux, agit favorablement chez environ un tiers des patients.
Depuis l’année 2000, la prise en charge médicamenteuse des maladies rhumatismales a considérablement évolué avec l’irruption de biothérapies. Ces dernières ciblent les processus inflammatoires et sont réputées beaucoup plus efficaces. Les biothérapies ont révolutionné la prise en charge de ces patients en réduisant les signes cliniques, en ralentissant la progression de la maladie, et en limitant ainsi les conséquences sur la qualité de vie et le handicap fonctionnel.
Cependant, la biothérapie, bien qu’efficace, reste une thérapeutique coûteuse et non dénuée d’effets secondaires si elle n’est pas bien indiquée. Heureusement, l’arrivée des biosimilaires, tout aussi efficaces mais moins coûteux que les traitements princeps, permettra un accès plus large aux patients.
Quelle est l’importance de l’activité physique dans la prise en charge et la prévention des pathologies rhumatologiques, et quels types d’exercices recommandez-vous ?
Malgré les douleurs et les raideurs, la pratique d’une activité physique régulière est recommandée. De récentes études ont démontré ses bienfaits pour les patients souffrant de rhumatismes inflammatoires chroniques. L’activité sportive est une thérapeutique reconnue et peut même être un outil préventif grâce à son influence sur le poids corporel, la force musculaire et l’inflammation synoviale.
Cependant, la pratique sportive doit être adaptée. Par exemple, une lésion arthrosique aura moins de répercussions sur des sports à faibles impacts comme la natation ou le cyclisme que sur des activités telles que le football, le basketball ou les sports de contact. Un matériel adéquat, tel que des chaussures permettant une absorption optimale des chocs, est également recommandé pour limiter la charge imposée aux articulations.
Les sports recommandés incluent la marche, la natation et le vélo. En revanche, les sports à déconseiller sont les sports de contact, le football, le basketball, le tennis, le volleyball ainsi que les courses à pied prolongées.