La visite du ministre de la Santé, le professeur Mohamed Seddik Aït Messaoudene, à Ouargla, vient confirmer une réalité que les chiffres ne cessent de rappeler : le Sud grandit, s’urbanise, et ses besoins sanitaires explosent à un rythme qui dépasse depuis longtemps les capacités d’une infrastructure conçue pour une autre époque.
Avec une population jeune, un étalement urbain accéléré et une pression croissante sur les hôpitaux, Ouargla illustre l’un des grands défis du pays : comment adapter la carte sanitaire nationale à un territoire où la demande en soins augmente plus vite que l’offre ?
C’est précisément cette équation que la visite ministerielle a voulu mettre en lumière.
Au CHU Mohamed Boudiaf, le ministre a pu mesurer l’ampleur du décalage entre les besoins réels des habitants et les moyens disponibles. Malgré la mobilisation des équipes, les services fonctionnent souvent au-delà de leurs capacités. Le chantier de réhabilitation du troisième étage est une réponse partielle, mais nécessaire, pour absorber une fréquentation qui s’intensifie chaque année.
Dans ce contexte, la mise en service d’une nouvelle unité spécialisée dans les brûlures constitue un tournant. À mesure que la région se développe industriellement et que les risques domestiques et professionnels augmentent, cette spécialité devient indispensable. Jusqu’ici, les habitants étaient contraints à des évacuations longues et coûteuses. La nouvelle unité vient donc combler un vide stratégique et répondre à un besoin croissant de prise en charge rapide.
La pose de la première pierre du futur Centre Hospitalo-Universitaire de 400 lits s’inscrit dans la même dynamique. Ce projet n’est pas un simple ajout, mais un redimensionnement complet de l’offre de soins dans la région. Avec un bassin de population en nette croissance, Ouargla ne pouvait plus se contenter de structures de niveau intermédiaire. Le CHU deviendra un pivot régional, capable non seulement de prendre en charge des pathologies complexes, mais aussi de former localement les professionnels nécessaires pour accompagner cette mutation démographique.
En parallèle, l’annonce de la construction d’un nouveau siège pour la Direction de la santé vise à moderniser la gestion administrative pour un territoire où la coordination entre établissements devient un enjeu majeur. Une santé publique efficace ne repose pas uniquement sur les bâtiments et les équipements, mais aussi sur une gouvernance capable de planifier et d’anticiper.
Les échanges du ministre avec les professionnels de santé et les habitants ont rappelé ce que tous constatent au quotidien : le manque de ressources humaines, les difficultés logistiques et une pression constante sur les services d’urgence. Ces difficultés ne sont pas seulement techniques ; elles résultent directement du changement démographique rapide que la région connaît depuis deux décennies.
En quittant Ouargla, le ministre n’a pas seulement présenté un programme d’investissements. Il a reconnu implicitement qu’une nouvelle carte sanitaire du Sud s’impose. Car derrière chaque chantier, chaque service ouvert et chaque structure annoncée, c’est une réponse à une question essentielle : comment garantir à une population en pleine expansion un accès à des soins dignes de ce nom ?
La transformation sanitaire du Sud ne se fera pas en un jour. Mais la visite d’Ouargla montre que l’État semble désormais prêt à penser le territoire en fonction de sa réalité présente — et non plus de son passé.
Tinhinane B