L’Institut National de Santé Publique (INSP) a publié, hier jeudi, son rapport annuel de l’année 2021 sur le système de collecte des données relatives aux femmes victimes de violence en Algérie. Ce rapport met en lumière l’ampleur alarmante de la violence à l’égard des femmes dans le pays et souligne l’importance de la sensibilisation et de l’action pour lutter contre ce fléau.
La violence à l’égard des femmes est un problème universel touchant des millions de femmes dans le monde, sans distinction d’âge, de situation socio-économique, de niveau d’éducation ou de région. Malheureusement, de nombreuses victimes de violence ne demandent pas d’aide et souffrent en silence.
Ce rapport s’appuie sur la Déclaration de l’Organisation des Nations Unies (ONU) sur l’élimination de la violence à l’égard des femmes, qui définit la violence comme tout acte dirigé contre le sexe féminin, causant des préjudices physiques, sexuels ou psychologiques. L’OMS considère la violence à l’égard des femmes comme une priorité de santé publique.
En Algérie, une enquête nationale réalisée par l’INSP en 2002-2003 en collaboration avec les ministères de la justice, de la jeunesse, de l’intérieur et de la solidarité a révélé des statistiques alarmantes. Les victimes sont en majorité jeunes, avec plus de la moitié des agressions se produisant au domicile. De plus, les violences psychologiques et sexuelles sont souvent sous-déclarées.
Pour lutter contre cette violence, l’INSP a contribué à l’élaboration d’une stratégie nationale de lutte et a mis en place un système de collecte de données permanent pour enregistrer les cas de femmes agressées. Ce système a été étendu à plusieurs wilayas en Algérie.
Les chiffres de l’année 2021 sont particulièrement préoccupants, avec plus de 2 000 femmes victimes de violences enregistrées dans les hôpitaux des wilayas étudiées. La majorité de ces femmes ont consulté le service de médecine légale, mais seules 11 % d’entre elles ont bénéficié d’une prise en charge psychologique, malgré les conséquences graves sur la santé mentale des victimes.
Les agresseurs sont le plus souvent des hommes, notamment les partenaires ou les membres de la famille des victimes. Les violences physiques sont les plus courantes, mais les violences psychologiques et sexuelles ne doivent pas être minimisées.
Le rapport conclut par une série de recommandations visant à lutter contre la violence à l’égard des femmes en Algérie. Parmi elles, l’élargissement de la collecte de données à toutes les régions sanitaires, la sensibilisation des professionnels de la santé, la coordination des ressources humaines et matérielles, et la mise en place d’une action globale du secteur de la santé pour lutter contre les conséquences de la violence.
En fin de compte, ce rapport met en évidence l’urgence de lutter contre la violence à l’égard des femmes en Algérie et appelle à une action concertée de la part du gouvernement, des professionnels de la santé et de la société civile pour protéger les droits et la sécurité des femmes.
Meriem Azoune
Quelques données extraites du rapport de l’INSP :
– Plus de la moitié des femmes agressées ont consulté le médecin pendant le deuxième semestre (55%) soit de juillet à décembre.
– 41% des femmes agressées ont consulté sans réquisition
– La majorité des femmes violentées étaient des jeunes dont l’âge moyen est de 35 ans ±12 ans avec des extrêmes allant de 2 ans à 89 ans.
– La classe modale était la classe d’âge entre 25 et 34 ans, et qui a représenté un taux de 33%, soit une femme agressée sur trois.
– Deux femmes agressées sur trois soit 63 % étaient mariées.
– Le nombre moyen d’enfants chez la femme victime de violence était de 2.8 enfants ± 1.6 enfants, avec un nombre minimum de 1 enfant et maximum de 13 enfants
– Le quart des femmes agressées (20%) avaient fait des études secondaires, tandis que 5% étaient sans instruction
– La Femme au foyer a représenté les 2/3 soit une fréquence de 65%
– Plus de 2/3 des femmes agressées soit 64% ont consulté toutes seules et le reste des femmes sont accompagnées par un membre de la famille
– Une femme sur quatre (24%) était victimes de violence entre octobre et décembre.
– L’agression s’est déroulée dans 34% des cas le soir, de 17h jusqu’à 00h
– Lorsque le foyer est le lieu de l’agression, trois femmes sur quatre ont été agressées chezelles, soit 73 % des cas
– L’âge moyen de l’agresseur déclaré était de 37 ± 11 ans.
– Dans la majorité des cas, l’agresseur était de sexe masculin (75%) avec un sex -ratio égal à 4.16
– Un agresseur sur trois (30%) avait un niveau d’instruction moyen.
64% des agresseurs se trouvaient sans emploi.
– Les agresseurs les plus souvent cités sont, par ordre décroissant, respectivement le mari (38%), un inconnu (8%), les voisins (8%). Si l’on regroupe les modalités, dans la majorité des cas, il s’agit d’une personne connue de la victime, vivant dans son entourage immédiat (60%).
– Moins du dixième des victimes ont été agressées par des inconnus (8%).
– Les agressions physiques ont représenté la majorité des violences déclarées (89%), suivies des agressions psychologiques (11%) et agressions sexuelles (7%).