Lutte contre le cancer: Une mutation du gène TP53 ouvre la voie à de nouvelles immunothérapies

Une équipe internationale de chercheurs vient de lever un coin du voile sur un mécanisme longtemps resté obscur dans la lutte contre le cancer. Publiée dans la revue Communications Biology (groupe Nature), leur étude révèle qu’une mutation particulière du gène TP53, connue sous le nom de R273H, pourrait rendre certaines tumeurs plus sensibles aux traitements d’immunothérapie.

Le gène TP53 est souvent décrit comme le « gardien du génome ». Sa mission consiste à protéger nos cellules contre les dérives de la division anarchique, en stoppant celles dont l’ADN est endommagé. Mais dans la moitié des cancers humains, ce gène est muté, et cette altération bouleverse son rôle protecteur. Or, toutes les mutations ne se comportent pas de la même manière : certaines désarment la cellule, d’autres la transforment profondément.

Les chercheurs ont comparé deux formes de cette mutation, R273H et R175H, et ont découvert que la première provoque un phénomène inattendu. Les cellules cancéreuses continuent à copier leur ADN alors qu’elles ne le devraient plus, créant un excès de matériel génétique instable. Cette dérive finit par libérer des fragments d’ADN dans le cytoplasme, lesquels déclenchent une alarme naturelle du système immunitaire appelée voie cGAS-STING. Autrement dit, la tumeur, en se détraquant, se trahit : elle devient plus visible pour le système de défense du corps.

Ce mécanisme, observé en laboratoire puis confirmé chez la souris, s’est traduit par une réponse nettement meilleure aux traitements d’immunothérapie, notamment ceux utilisant les anticorps anti-PD-1, déjà employés dans plusieurs cancers. Les analyses de grandes bases de données de patients ont d’ailleurs montré la même tendance : les tumeurs porteuses de la mutation R273H présentent une activité immunitaire plus élevée et réagissent plus favorablement à ces traitements.

Ces résultats pourraient marquer une étape importante vers une médecine de précision. Ils suggèrent que la simple mention « mutation de TP53 » ne suffit plus : il faut en connaître le type exact. Deux patients atteints d’un même cancer pourraient donc répondre de façon radicalement différente selon la nature de cette mutation.

L’étude ouvre aussi la voie à de nouvelles combinaisons thérapeutiques. En provoquant volontairement cette instabilité de l’ADN, on pourrait, par exemple, stimuler la voie immunitaire cGAS-STING avant d’administrer une immunothérapie, afin d’en renforcer les effets.

Les auteurs restent toutefois prudents : ce mécanisme, s’il active l’immunité, peut aussi générer une inflammation persistante, parfois nuisible. D’autres recherches sont nécessaires pour comprendre dans quels contextes il agit au bénéfice du patient.

Au-delà de sa portée scientifique, cette découverte souligne l’importance croissante de la biologie moléculaire dans le traitement du cancer.

Nouhad Ourebzani