On le surnomme parfois le « compagnon fidèle » de l’hypertension. Le diabète, surtout lorsqu’il est mal contrôlé, forme avec elle un duo dévastateur qui fragilise les artères et abîme le cœur. En Algérie, la maladie touche déjà plus de 4 millions de personnes, et la tendance est à la hausse. Derrière chaque chiffre se cache une réalité implacable : le diabète n’est pas seulement une question de sucre dans le sang, c’est aussi un facteur majeur de maladies cardiovasculaires, première cause de mortalité dans notre pays.
La menace est double. L’excès de glucose abîme progressivement les parois des vaisseaux sanguins, les rendant plus rigides et vulnérables. Avec le temps, cette atteinte invisible prépare le terrain à l’athérosclérose, ces dépôts graisseux qui bouchent les artères et réduisent la circulation sanguine. Ajoutez à cela la hausse fréquente du cholestérol, l’obésité et l’hypertension, et vous obtenez une véritable bombe à retardement. Ainsi, une personne diabétique a deux à quatre fois plus de risques de faire un infarctus ou un accident vasculaire cérébral qu’une personne non diabétique.
Le drame est que beaucoup découvrent ce danger trop tard. Souvent, le premier signal est un infarctus ou une crise cardiaque. Or, la médecine dispose aujourd’hui de moyens de prévention efficaces : un suivi régulier du taux de glycémie, un contrôle du poids et de la tension, des bilans sanguins annuels pour vérifier le cholestérol. Le dépistage précoce reste l’arme la plus puissante, mais il suppose un réflexe encore trop absent chez les Algériens.
Les habitudes alimentaires constituent un autre terrain de bataille. Trop de plats traditionnels, bien que riches en saveurs, sont également très riches en sucres rapides ou en graisses saturées. Les boissons sucrées, largement consommées au quotidien, aggravent encore la situation. Pourtant, les médecins ne cessent de le rappeler : adopter une alimentation équilibrée, riche en légumes, en fibres, en fruits frais, et pauvre en sucres raffinés, est déjà un traitement en soi. À cela s’ajoute la nécessité de bouger : trente minutes de marche par jour suffisent pour améliorer la sensibilité à l’insuline et protéger le cœur.
Le défi n’est pas uniquement médical, il est aussi social et culturel. Les campagnes de sensibilisation existent, mais elles manquent de continuité et d’impact. Dans les quartiers populaires comme dans les zones rurales, la connaissance de la maladie reste souvent limitée, et les idées reçues persistent. Certains pensent encore que le diabète est une fatalité héréditaire, d’autres qu’il suffit d’éviter le sucre visible pour échapper à ses effets. La réalité est bien plus complexe, et elle demande une prise de conscience collective.
Face à l’ampleur du problème, les experts plaident pour une stratégie nationale plus volontariste. Former les médecins généralistes à dépister plus tôt, encourager les pharmacies à proposer des contrôles gratuits de la glycémie, impliquer les associations de patients dans l’éducation thérapeutique : autant de pistes pour freiner cette épidémie silencieuse.
Le diabète est une maladie chronique, mais il n’est pas une condamnation. En apprenant à le maîtriser, on peut réduire considérablement les risques cardiovasculaires qui l’accompagnent. La clé réside dans une vérité simple, trop souvent oubliée : soigner son sucre, c’est aussi protéger son cœur.
Nouhad Ourebzani