Et si la lutte contre la démence passait par une meilleure gestion de l’hypertension artérielle ? Une nouvelle étude publiée dans Nature Medicine offre des résultats sans équivoque : abaisser durablement la pression artérielle chez les personnes souffrant d’hypertension non contrôlée permettrait de réduire significativement le risque de développer une démence. Cette découverte, issue d’une collaboration sino-américaine, pourrait bien transformer les approches de prévention à l’échelle mondiale.
L’étude s’est déroulée dans 326 villages ruraux de Chine et a impliqué près de 34 000 adultes âgés de 40 ans et plus. Les participants ont été divisés en deux groupes : l’un a bénéficié d’un traitement intensif incluant des médicaments antihypertenseurs gratuits ou à faible coût, un suivi médical personnalisé et des conseils en hygiène de vie ; l’autre a reçu les soins habituels disponibles dans leur communauté. Après quatre ans, les résultats parlent d’eux-mêmes : le groupe ayant reçu l’intervention ciblée présente un risque de démence réduit de 15 %, et un risque de troubles cognitifs légers réduit de 16 %.
Ces chiffres résonnent fortement dans un contexte où la démence touche de plus en plus de personnes à travers le monde. Selon l’Organisation mondiale de la santé, 57 millions d’individus étaient atteints de démence en 2021. Un chiffre appelé à grimper en flèche dans les décennies à venir, au rythme du vieillissement de la population. Pourtant, les spécialistes insistent depuis des années sur un point essentiel : la démence n’est pas une conséquence inéluctable du vieillissement. Des recherches antérieures ont montré qu’environ la moitié des cas pourraient être évités ou retardés en s’attaquant à quatorze facteurs de risque identifiés, parmi lesquels figurent la perte auditive, le tabagisme, l’obésité, l’isolement social, l’excès d’alcool… et bien sûr, l’hypertension.
L’intérêt de cette nouvelle étude est double : elle démontre non seulement qu’un contrôle rigoureux de la pression artérielle est efficace, mais aussi qu’il est possible de mettre en œuvre des solutions concrètes, même dans des zones rurales aux ressources limitées. Pour le professeur Jiang He, co-auteur de l’étude, les implications sont claires : « Le traitement antihypertenseur peut prévenir la démence chez les patients souffrant d’hypertension non contrôlée. Cette approche simple et peu coûteuse devrait être largement adoptée. »
Bien qu’elle présente certaines limites — notamment l’absence d’évaluation cognitive au début de l’étude —, cette recherche apporte un nouvel éclairage sur l’importance de la prévention dans la lutte contre les maladies neurodégénératives. Elle rappelle surtout que prendre soin de son cœur, c’est aussi protéger son cerveau. Un message fort, à l’heure où la médecine cherche à ralentir l’épidémie silencieuse de la démence.
Nouhad Ourebzani
