Hypertension artérielle : le tueur silencieux

En Algérie, un danger discret progresse derrière les murs des foyers, souvent sans que l’on en prenne la mesure : l’hypertension artérielle. Elle ne fait pas de bruit, n’alerte pas toujours par des symptômes évidents, mais elle use le cœur, fragilise les reins, prépare le terrain aux accidents vasculaires cérébraux et aux infarctus. Les spécialistes la surnomment « le tueur silencieux ». Les chiffres, eux, parlent d’une urgence nationale : selon les estimations des sociétés savantes, près d’un adulte sur trois serait hypertendu en Algérie, et une large partie l’ignore encore.

La banalisation de cette maladie chronique est sans doute son plus grand piège. Beaucoup associent encore l’hypertension à la vieillesse, alors qu’elle touche de plus en plus les jeunes adultes, parfois dès la trentaine. À cela s’ajoutent des habitudes de vie qui aggravent la situation : excès de sel, plats gras et riches en sucres, sédentarité liée au travail de bureau et au temps passé devant les écrans. Dans les grandes villes, le stress permanent, les embouteillages, la pression économique et sociale constituent autant de facteurs déclencheurs.

Le constat des cardiologues est clair : les consultations arrivent souvent trop tard. Ce n’est qu’à l’occasion d’un malaise, d’une fatigue persistante, ou après une complication grave, que beaucoup découvrent qu’ils vivent avec une tension artérielle élevée depuis des années. Le dépistage précoce, pourtant simple et peu coûteux, reste trop rare. La mesure de la tension artérielle ne prend que quelques minutes, mais elle peut changer le destin d’un patient. Car une hypertension non traitée double le risque d’accident vasculaire cérébral et multiplie par trois le risque d’infarctus.

Les solutions existent, mais elles supposent un changement de regard et de comportement. Il ne s’agit pas seulement de prescrire un traitement médicamenteux, encore que celui-ci soit parfois indispensable et à vie. Il s’agit surtout d’apprendre à rééquilibrer son mode de vie. Les médecins insistent sur quelques gestes simples, mais puissants : réduire le sel à table, éviter les plats industriels trop riches en sodium, bouger chaque jour au moins trente minutes, maintenir un poids de forme, et ne pas négliger la qualité du sommeil. Ce sont ces ajustements qui, mis bout à bout, allègent la pression sur les artères et redonnent au cœur sa force tranquille.

La prévention est d’autant plus cruciale que l’Algérie connaît une transition épidémiologique rapide : les maladies infectieuses reculent, mais les pathologies chroniques liées au mode de vie prennent le dessus. Le vieillissement de la population, l’urbanisation, la diffusion d’une alimentation trop riche et la diminution de l’activité physique créent un terrain fertile pour l’hypertension. À défaut d’une mobilisation collective, les hôpitaux continueront d’accueillir chaque jour des patients victimes de crises hypertensives, d’accidents vasculaires ou de défaillances cardiaques.

L’hypertension n’est pas une fatalité. C’est une alerte silencieuse qui invite à prendre soin de soi autrement. À l’échelle individuelle comme à l’échelle nationale, le combat se joue dans l’ordinaire : dans l’assiette, dans la marche quotidienne, dans la décision de faire contrôler régulièrement sa tension. Dans ce choix aussi de rompre avec l’indifférence qui laisse prospérer le danger. Car protéger son cœur, c’est protéger sa vie.

Tinhinane B

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