Le microbiome intestinal, un acteur clé dans la sclérose en plaques ?

Une nouvelle étude allemande ouvre la voie

Et si l’intestin détenait une partie des clés de la sclérose en plaques (SEP) ? C’est la piste passionnante explorée par une nouvelle étude menée par des chercheurs de la Ludwig-Maximilians-Universität (LMU) de Munich, qui viennent de publier des résultats confirmant l’influence déterminante du microbiome intestinal sur le développement et l’aggravation de cette maladie neurologique auto-immune.

La sclérose en plaques, qui touche plus de deux millions de personnes dans le monde, est caractérisée par une attaque du système immunitaire contre la gaine de myéline qui protège les neurones. Si les causes exactes restent en partie obscures, la recherche s’intéresse de plus en plus à l’interaction complexe entre prédispositions génétiques et facteurs environnementaux — dont l’alimentation et la flore intestinale.

Dans cette nouvelle étude, l’équipe dirigée par le professeur Michael Hiltensperger du Klinikum der LMU a analysé des échantillons de selles de patients atteints de SEP et de sujets sains, avant de transférer ces microbiotes dans des modèles murins. Résultat : les souris ayant reçu le microbiome des patients malades ont développé une forme sévère de la maladie, tandis que celles ayant reçu des microbiotes sains sont restées protégées. Ce transfert a suffi à déclencher une réponse auto-immune contre le système nerveux central.

Ce travail démontre ainsi, pour la première fois avec autant de précision, que certains déséquilibres du microbiote intestinal ne sont pas seulement associés à la sclérose en plaques, mais pourraient en être des facteurs déclenchants. Le mécanisme mis en lumière montre que ces bactéries intestinales altérées provoquent une activation anormale des cellules T pro-inflammatoires, qui finissent par s’attaquer au cerveau et à la moelle épinière.

Pour le professeur Hiltensperger, ces résultats renforcent l’idée que “le microbiome pourrait représenter une cible thérapeutique prometteuse”, permettant non seulement de mieux comprendre la maladie, mais aussi d’agir en amont. Des interventions telles que la modulation du microbiote par des probiotiques spécifiques, des greffes de microbiote ou des régimes personnalisés pourraient à terme accompagner, voire renforcer, les traitements existants.

La recherche doit désormais franchir une nouvelle étape : identifier les souches bactériennes précises responsables de ce déséquilibre et déterminer si leur éradication ou remplacement permettrait de réduire l’incidence ou la sévérité de la SEP.

Cette étude, publiée dans Nature, s’ajoute à une série croissante de travaux qui déplacent le regard des neurologues vers… les intestins. Preuve, une fois encore, que le “cerveau du ventre” n’a pas encore livré tous ses secrets.

Nouhad Ourebzani

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