Alors que le monde tourne la page du Covid-19, l’Algérie redouble de prudence. Derrière la stabilité apparente du paysage sanitaire, les autorités constatent la persistance — et parfois la résurgence — de certaines maladies infectieuses que l’on croyait disparues. Diphthérie, malaria, choléra : les noms rappellent d’autres époques, mais leur écho résonne à nouveau, en sourdine, dans certaines régions du pays.
Le directeur général de la prévention et de la promotion de la santé, Dr Djamel Fourar, l’a reconnu lors d’une conférence de presse tenue à Alger : « Les maladies transmissibles demeurent un défi réel pour la santé publique, malgré la stabilité globale de la situation ». Une stabilité qui, selon lui, repose sur une stratégie nationale de veille et de riposte articulée autour d’un mot d’ordre : anticiper plutôt que subir.
Et les chiffres parlent d’eux-mêmes. Entre 2023 et 2024, 2 287 901 enfants ont été vaccinés contre la poliomyélite dans 19 wilayas du Sud, régions historiquement les plus vulnérables. Dans la même dynamique, 84 370 personnes à Skikda et 43 197 à Aïn Defla ont été immunisées contre la diphtérie. Des campagnes massives, menées sous la supervision d’équipes mobiles de santé publique, qui témoignent d’une mobilisation sanitaire rarement égalée depuis la fin des années 1980.
Mais au-delà des chiffres, l’enjeu est clair : éviter le retour des épidémies à l’ère de la mondialisation. À Tamanrasset, porte d’entrée des flux migratoires vers le nord du pays, la vigilance est à son comble. Le Pr Elyès Akhamoukh, chef du service des maladies infectieuses, affirme que « la région reste la plus exposée du pays ». Si aucun cas de choléra n’a été enregistré à ce jour, un dispositif de veille sanitaire permanent est activé. Tous les médecins de la wilaya ont été formés à la détection et à la prise en charge rapide d’éventuelles alertes.
Dans un geste inédit, les campagnes de vaccination ont également inclus 33 000 personnes étrangères résidant sur le territoire national entre 2023 et 2025. Une décision saluée par les spécialistes, qui y voient une approche inclusive et pragmatique : « On ne protège pas une population en en laissant une autre vulnérable », rappelle un responsable sanitaire.
Pour le ministère de la Santé, la prévention reste la clé. Surveillance renforcée, stocks de vaccins sécurisés, formation continue du personnel médical : l’appareil sanitaire algérien se veut désormais proactif et réactif à la fois, prêt à intervenir avant que les maladies oubliées ne refassent surface.
Car dans un contexte régional où plusieurs pays voisins signalent la réapparition de foyers épidémiques, l’Algérie a choisi son cap : celui de la vigilance permanente, soutenue par la science et le terrain.
Tinhinane B
