Vitamine D contre le cancer : un gène clé révélé par CRISPR

Et si la vitamine D devenait l’alliée inattendue de la lutte contre le cancer ? Une équipe de chercheurs qataris et jordaniens, dirigée par le Pr Georges Nemer, vient de franchir une étape déterminante. Grâce à la technologie CRISPR, ils ont identifié un gène crucial, SDR42E1, capable de décupler l’effet de la vitamine D dans l’organisme… et de bloquer net la croissance tumorale.

Jusqu’ici méconnu, le gène SDR42E1 s’est révélé être un véritable chef d’orchestre de la vitamine D. Il contrôle à la fois son absorption intestinale et sa transformation en calcitriol, la forme active de cette hormone essentielle au bon fonctionnement du corps humain. En désactivant ce gène dans des cellules cancéreuses du côlon, les chercheurs ont provoqué une baisse spectaculaire de leur viabilité : jusqu’à 53 % de réduction de la survie cellulaire.

Plus encore, ce blocage a perturbé l’activité de plus de 4 600 autres gènes, bouleversant l’équilibre moléculaire des cellules tumorales. Résultat : un affaiblissement ciblé de la tumeur, sans impact sur les cellules saines.

Cette avancée ouvre une voie inédite pour la cancérologie de demain : au lieu de s’attaquer aveuglément à toutes les cellules en division comme le font les chimiothérapies classiques, l’inhibition de SDR42E1 pourrait permettre un traitement plus fin, plus sûr et plus efficace, en ciblant précisément les circuits métaboliques du cancer.

Mais ce n’est pas tout. Les chercheurs entrevoient aussi des applications dans d’autres domaines : renforcer l’expression de SDR42E1, au contraire, pourrait améliorer la biodisponibilité de la vitamine D chez les personnes souffrant d’ostéoporose, de troubles immunitaires ou de maladies métaboliques.

Malgré l’enthousiasme suscité par ces résultats, les auteurs appellent à la prudence. Jouer avec l’équilibre de la vitamine D est une opération délicate : un excès, tout comme une carence, peut avoir des effets néfastes sur l’organisme. Des études complémentaires seront nécessaires pour mesurer l’efficacité et la sécurité de toute future thérapie ciblant SDR42E1.

« C’est une découverte fondamentale », estime la Pr Nagham Nafiz Hendi, co-autrice de l’étude. « Mais nous sommes encore au début du chemin clinique. Il faudra des années de recherche pour en faire un outil thérapeutique validé. »

Cette percée illustre une tendance forte de la médecine contemporaine : agir à la racine des mécanismes cellulaires, en exploitant les clés génétiques qui régulent nos fonctions biologiques les plus fondamentales. Grâce à CRISPR, l’édition du génome ouvre des perspectives immenses : non plus seulement traiter les symptômes, mais corriger les déséquilibres à la source.

Avec SDR42E1, la vitamine D se dote d’un nouvel atout, et les chercheurs d’une nouvelle cible. Le combat contre le cancer vient peut-être de gagner un allié de poids : notre propre métabolisme.

Ouiza Lataman

Ce site utilise des cookies pour améliorer votre expérience. Nous supposerons que vous êtes d'accord avec cela, mais vous pouvez vous désinscrire si vous le souhaitez. Accept Read More