Et si la forêt guérissait… ou rendait malade ?

Une étude européenne révèle les effets ambivalents de la biodiversité forestière sur la santé humaine

Parfois refuge, parfois menace silencieuse, la forêt n’est pas ce havre de paix uniforme que l’imaginaire collectif aime à invoquer. Dans une étude publiée ce 19 mai 2025 dans Nature Sustainability, une équipe de chercheurs européens bouleverse les idées reçues : oui, les forêts sont bénéfiques à notre santé, mais pas toutes, pas toujours — et pas pour tout le monde.

Menée sur 164 sites forestiers européens, cette étude d’envergure mobilise un réseau bayésien — une méthode d’analyse causale complexe — pour explorer sept voies par lesquelles les forêts influencent directement ou indirectement notre bien-être physique et mental. L’enjeu : dépasser les généralisations pour comprendre comment la structure (densité de la canopée, stratification végétale) et la biodiversité (nombre d’espèces arborées) modulent ces effets.

Les conclusions sont nuancées. Ainsi, une canopée dense offre de réels avantages : elle régule la température ambiante, filtre la pollution atmosphérique, et isole des nuisances sonores urbaines. Mais elle peut également faire obstacle à la lumière, réduire la diversité des plantes médicinales disponibles et favoriser l’humidité propice aux tiques vectrices de la maladie de Lyme.

De même, une grande diversité d’espèces d’arbres est généralement associée à un mieux-être psychologique accru et à une meilleure résilience écologique. Mais ce bénéfice peut être contrecarré par une complexification des écosystèmes, rendant plus difficile la gestion sanitaire ou la prévision de certains risques biologiques.

L’étude ne verse ni dans l’alarmisme, ni dans l’idéalisation. Elle plaide pour une gestion éclairée des forêts, à la croisée de la santé publique et de l’écologie. Car il ne suffit pas de protéger les forêts : il faut aussi comprendre comment les préserver tout en optimisant leurs bénéfices pour les sociétés humaines.

Les auteurs appellent ainsi les urbanistes, les forestiers, les médecins et les décideurs politiques à dialoguer davantage. Face au dérèglement climatique, à l’augmentation des maladies chroniques et à la quête de mieux-vivre, la forêt apparaît non seulement comme un enjeu écologique, mais aussi comme une infrastructure de santé naturelle — à condition d’en maîtriser les subtilités.

Ouiza Lataman

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