Une étude scientifique récente vient lever un coin du voile sur les effets méconnus de la pollution atmosphérique sur la santé infantile. Publiée dans la revue Science of the Total Environment, cette recherche menée aux Pays-Bas révèle que l’exposition de courte durée à plusieurs polluants atmosphériques altère significativement la composition du microbiote nasal chez les enfants d’âge scolaire.
Le microbiote nasal, souvent négligé par rapport au microbiote intestinal, joue pourtant un rôle essentiel dans la défense immunitaire des voies respiratoires. Il constitue une barrière naturelle contre les agents pathogènes, régule l’inflammation, et participe au bon fonctionnement du système immunitaire local.
L’étude, conduite auprès de 173 enfants âgés de 8 à 11 ans, a mesuré de manière individuelle leur exposition à différents polluants — notamment le dioxyde d’azote (NO₂), les particules fines PM₂.₅, le carbone suie (black carbon) et l’ozone (O₃) — pendant plusieurs jours, à l’aide de capteurs portables. En parallèle, des échantillons du microbiote nasal ont été analysés grâce au séquençage génétique pour évaluer la diversité et la composition bactérienne.
Les résultats sont sans appel : une exposition accrue au NO₂, aux PM₂.₅ et au carbone suie entraîne une réduction significative de la diversité bactérienne, ainsi qu’un déséquilibre dans les populations microbiennes. Certaines espèces bénéfiques régressent, tandis que d’autres, potentiellement pro-inflammatoires, prennent le dessus. Ce phénomène, appelé dysbiose, est susceptible d’affaiblir les défenses locales des voies respiratoires, rendant les enfants plus vulnérables aux infections et aux inflammations chroniques.
Fait marquant : même des expositions à court terme, sur quelques jours seulement, suffisent à perturber cet équilibre fragile, ce qui souligne la réactivité biologique du microbiote nasal aux variations de la qualité de l’air. À l’heure où de nombreuses grandes villes peinent à respecter les seuils recommandés par l’OMS, cette donnée interpelle.
Les chercheurs mettent en garde contre les effets potentiels à long terme de ces perturbations répétées, en particulier chez les enfants vivant en milieu urbain dense, où la pollution est chronique. Ils appellent à des politiques publiques plus ambitieuses en matière de qualité de l’air, et plaident pour une meilleure prise en compte des effets microbiotiques dans les évaluations sanitaires environnementales.
Cette étude vient ainsi renforcer un corpus croissant de recherches montrant que la pollution atmosphérique ne se contente pas d’irriter les voies respiratoires ou de provoquer des maladies cardiovasculaires : elle affecte aussi, en silence, l’écosystème microscopique qui protège notre santé au quotidien.
Nouhad Ourebzani