Pr Keltoum Messahli, invitée de l’émission « Sahtek Bin Yeddik » : Les droits du malade au cœur de l’éthique médicale

Invitée de l’émission « Sahtek Bin Yeddik », le Pr Keltoum Messahli, cheffe du service de médecine légale au CHU Frantz Fanon de Blida, a longuement abordé avec la journaliste Samira Faidi, la question des droits du malade et le rôle éthique du médecin.
Dès le début de son intervention, la spécialiste rappelle que « les droits du malade existent depuis très longtemps ». Elle explique que ces principes ne datent pas seulement du serment d’Hippocrate : »Tous les médecins connaissent le serment d’Hippocrate. Mais savez-vous que les droits des malades ont été écrits bien avant la civilisation grecque ? », souligne-t-elle. Selon elle, des penseurs et philosophes de civilisations anciennes avaient réfléchi à la souffrance, à la maladie et respect du malade. « Ils ont rédigé des textes où il est clairement question de la protection des droits du malade ».
Hippocrate a ensuite « consacré à travers plusieurs points de son serment, le côté éthique de la médecine ». Au fil de siècles, la discipline s’est organisée, donnant naissance à des lois et à un code de déontologie médicale, qui reprend ces valeurs fondamentales et les rend obligatoires pour les praticiens. « Ce code, explique-t-elle, réglemente les principes éthiques et oblige le médecin à les appliquer dans le cadre de sa pratique ».
Parmi les principaux droits du patient, le Pr Messahli évoque en premier lieu le livre choix du médecin : « Le malade a le droit de choisir son praticien. On ne peut pas lui imposer un médecin qu’il ne souhaite pas consulter ». Sur le terrain, admet-elle, l’application de ce principe dépend des situations, mais « dans le code, c’est un droit fondamental ».
Vient ensuite le devoir d’impartialité : « Le médecin ne doit faire aucune distinction entre les patients. Dès lors qu’il prend en charge un malade, il doit lui prodiguer des soins consciencieux, dévoués et conformes aux données les plus récentes de la science ». Pour cela, le professionnel de santé doit se former en continu. « C’est une obligation, insiste-t-elle. Le médecin doit soigner sans discrimination d’âge, de sexe, de couleur de peau, et ce, aussi bien en temps de guerre qu’en temps de paix ».
Elle met également en garde contre toute hiérarchie arbitraire dans la prise en charge : « Un médecin ne doit jamais prioriser un patient plus jeune au détriment d’un autre, ou choisir de soigner celui qui a moins de maladies chroniques. Ce raisonnement va à l’encontre de l’éthique médicale ».
Evoquant la période de la pandémie, elle rappelle que le manque d’oxygène avait posé des dilemmes douloureux aux soignants. « Dans les situations de catastrophe, le code de déontologie est clair : il faut donner les soins en commençant par celui qui mobilise le moins de moyens, afin de sauver le plus grand nombre ». Dans ces circonstances, précise-t-elle, »l’équipe de groupe remplace l’éthique individuelle », mais cela ne doit jamais mener à des discriminations « ni d’âge, ni de gravité de la maladie, ni d’aucune autre nature ».
Parmi les autres droits essentiels, le devoir d’assistance à personne en danger est incontournable. « Lorsqu’il s’agit de sauver une vie, aucune dérogation n’est permise : le médecin doit agir ». Elle rappelle aussi l’obligation d’informer le patient sur son état de santé, ainsi que la nécessité d’obtenir son consentement éclairé avant tout acte médical ou traitement Le respect de la vie privée et de l’intimité du malade fait également partie intégrante de ces droits fondamentaux.
Abordant ensuite le mois de sensibilisation au cancer du sein, le Pr Messahli évoque les situations douloureuses vécues par certaines femmes malades : « Malheureusement, il arrive que des femmes engagées dans un long combat contre la maladie soient abandonnées par leurs maris. C’est désolant ». Elle insiste sur l’importance du soutien familial, qu’elle qualifie de « pierre angulaire de la prise en charge ». « Un malade non soutenu psychologiquement peut voir son état se dégrader, même avec les meilleurs soins médicaux », rappelle-t-elle. A l’inverse, de nombreux cas de rémission totale ont été observés chez des patientes entourées d’un appui inconditionnel de leurs proches. « La malade a droit à des soins, mais aussi à un accompagnement psychologique, et sa famille doit être préparée à l’aider ».
Pour la Pr Messahli, informer les patients sur leurs droits reste une mission essentielle du corps médical : « Dans la majorité des cas, le malade ne connaît pas ses droits. C’est au médecin de les lui expliquer ».
Hassina Amrouni

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