En juin dernier, la revue Nature Cell Biology*a publié une étude pionnière qui pourrait transformer le traitement des cancers les plus agressifs, tels que le cancer du pancréas et certains types de cancer du sein. Les progrès récents en chimiothérapie et en immunothérapie ont amélioré les taux de survie des patients, mais les cancers à fort potentiel métastatique demeurent un défi de taille. Ces tumeurs sont capables de former des métastases très rapidement tout en restant souvent indétectables pendant de longues périodes.
Le Professeur Thomas Brabletz, titulaire de la Chaire de médecine expérimentale I à l’Université Friedrich-Alexander (FAU), explique : « Ces tumeurs sont particulièrement traîtres et mortelles car elles forment des métastases à une vitesse alarmante et souvent sans signes précurseurs clairs. » Il y a environ 20 ans, le Professeur Brabletz a découvert que les métastases résultent de la migration des cellules souches cancéreuses. Il a identifié que les cellules épithéliales, qui composent une tumeur compacte, se transforment en cellules avec des propriétés mésenchymateuses. Ces cellules peuvent ainsi migrer à travers le corps et former des métastases, avant de se transformer à nouveau en cellules épithéliales pour poursuivre leur propagation.
En collaboration avec son équipe, le Professeur Brabletz a récemment découvert le point faible des cellules cancéreuses migrantes : leur métabolisme modifié. Ces cellules stockent une concentration élevée d’acides gras polyinsaturés dans leur membrane cellulaire, ce qui les rend à la fois élastiques et sensibles à un phénomène appelé ferroptose. Découverte en 2012, la ferroptose est une forme de mort cellulaire non programmée causée par des radicaux de fer et d’oxygène. Selon le Professeur Brabletz, « Les acides gras polyinsaturés s’oxydent, endommagent les membranes cellulaires et entraînent la destruction totale de la cellule. »
Les recherches ont montré que les cellules tumorales mésenchymateuses peuvent être spécifiquement ciblées et détruites par ferroptose. « Nous travaillons actuellement à manipuler pharmacologiquement certaines enzymes pour rendre ces cellules encore plus sensibles à la ferroptose », précise Brabletz. Cette approche pourrait conduire à de nouvelles options thérapeutiques pour les cancers agressifs.
La combinaison de thérapies ciblant la ferroptose avec des chimiothérapies classiques et des immunothérapies est envisagée pour le traitement à long terme du cancer. Cette avancée représente une lueur d’espoir significative pour les patients confrontés à des formes de cancer particulièrement difficiles à traiter.
Nouhad Ourebzani