Une étude récente publiée dans BMC Medicine révèle que les patients atteints de psoriasis présentent un risque accru de développer le syndrome de Sjögren (SS), une maladie auto-immune chronique. Les chercheurs ont mis en lumière des mécanismes immunologiques partagés entre ces deux pathologies, soulignant la nécessité de surveiller de près les patients atteints de psoriasis.
Le syndrome de Sjögren : une maladie aux multiples facettes
Le syndrome de Sjögren, qui touche principalement les femmes, se manifeste par une attaque du système immunitaire contre les glandes responsables de l’humidité dans les yeux, la bouche et d’autres parties du corps. Si les principaux symptômes incluent la sécheresse oculaire et buccale, le SS peut également provoquer des douleurs articulaires, une fatigue intense et, dans certains cas, affecter des organes comme les poumons, les reins et le système nerveux. À ce jour, aucun remède n’existe pour cette maladie.
L’étude en chiffres
Menée à partir des vastes données anonymisées de la base TriNetX aux États-Unis, l’étude a analysé les dossiers de 293 905 patients atteints de psoriasis et un nombre égal de patients sans psoriasis, sur une période s’étendant de 2004 à 2022. Les participants ont été appariés selon des critères tels que l’âge, le statut socio-économique, les comorbidités et les facteurs de mode de vie.
Parmi les résultats, 3 339 patients atteints de psoriasis ont développé un syndrome de Sjögren, contre 1 937 dans le groupe témoin. Ces données révèlent un risque accru de 50 % de développer un SS pour les patients atteints de psoriasis, même après ajustement pour d’autres facteurs de confusion (HR : 1,50 ; IC à 95 % : 1,42-1,58).
Les patients atteints d’arthrite psoriasique davantage exposés
Les analyses de sous-groupes ont montré que les patients atteints d’arthrite psoriasique (PsA) et ceux traités par des agents biologiques présentent un risque encore plus élevé de développer un SS. Cette corrélation renforce l’hypothèse selon laquelle des mécanismes pathogéniques communs, tels que la prolifération cellulaire et les réponses immunitaires exacerbées, sous-tendent les deux maladies.
Une analyse transcriptomique pour décrypter les mécanismes
Les chercheurs ont également mené une analyse transcriptomique, qui a révélé des similitudes moléculaires entre le psoriasis et le syndrome de Sjögren. Parmi les mécanismes partagés figurent la prolifération cellulaire, le recrutement de cellules immunitaires, la libération de cytokines et les réponses à l’interféron (IFN) en cas d’infection virale. Ces résultats ouvrent des perspectives pour identifier des biomarqueurs communs et développer des traitements ciblés.
Limites de l’étude
Malgré ses apports, l’étude comporte des limites. La base de données TriNetX ne fournit pas d’informations sur la gravité ou la durée du psoriasis, empêchant ainsi d’évaluer l’impact de ces facteurs sur le risque de SS. Par ailleurs, la nature observationnelle de l’étude ne permet pas d’établir une causalité directe entre les deux maladies.
Perspectives et implications cliniques
Les auteurs de l’étude appellent à approfondir les recherches sur les liens moléculaires entre le psoriasis et le syndrome de Sjögren. « Comprendre ces connexions pourrait permettre de mieux identifier les patients à risque et de développer des stratégies thérapeutiques innovantes », soulignent-ils.
Cette découverte renforce l’idée que le psoriasis, au-delà de son impact dermatologique, peut être associé à d’autres maladies auto-immunes graves. Pour les professionnels de santé, cela signifie une vigilance accrue envers les patients souffrant de psoriasis, notamment ceux atteints de formes sévères ou d’arthrite psoriasique.
Nouhad Ourebzani