Dans un contexte de préoccupations croissantes liées à la sécurité alimentaire mondiale, une équipe de chercheurs de l’Université de Tübingen, dirigée par le professeur Lars Angenent, a franchi une étape cruciale dans le développement de substituts alimentaires durables. Leur innovation repose sur un procédé biotechnologique capable de produire des protéines et de la vitamine B9 à partir de simples éléments comme le dioxyde de carbone, l’hydrogène, l’oxygène, et de l’électricité issue de sources renouvelables. Cette découverte prometteuse pourrait révolutionner l’alimentation humaine, en réduisant notre dépendance à l’élevage tout en répondant aux besoins d’une population mondiale en constante croissance.
Un procédé novateur : de l’air aux protéines
Le système mis au point par l’équipe de Tübingen utilise deux micro-organismes dans un bioréacteur sophistiqué. D’abord, une bactérie transforme le dioxyde de carbone en acétate, un composé qui est ensuite métabolisé par la levure de boulanger pour produire des protéines. Ce processus est non seulement efficace mais également respectueux du climat, car il ne nécessite pas de terres agricoles ou d’eau en quantités excessives, contrairement aux méthodes traditionnelles de production alimentaire.
Une innovation au service de la santé : la production de vitamine B9
Un des aspects les plus remarquables de cette recherche est la capacité des scientifiques à produire simultanément de la vitamine B9 (acide folique), un nutriment essentiel pour l’organisme humain. « Les humains ne peuvent se contenter de protéines, ils ont aussi besoin de vitamines. Notre objectif est donc de coproduire ces nutriments vitaux sans avoir à les ajouter artificiellement », explique le professeur Angenent.
Pour atteindre ce but, les chercheurs ont remplacé la bactérie initialement utilisée par une souche plus économe capable de produire elle-même l’acide folique. Cette nouvelle étape permet à la levure de produire des quantités significatives de vitamine B9, sans recours à des suppléments externes. Selon l’équipe, six grammes de cette levure produite suffisent à couvrir les besoins journaliers en vitamine B9 d’une personne.
Des perspectives prometteuses, mais des défis à relever
Bien que les résultats obtenus soient impressionnants, ce produit n’est pas encore prêt pour la consommation. « Notre système doit encore être optimisé et adapté à des installations à plus grande échelle », précise le professeur Angenent. En outre, certaines substances présentes dans la levure, comme celles pouvant provoquer la goutte, devront être éliminées avant que cette protéine ne puisse être commercialisée. Des études supplémentaires seront nécessaires pour garantir la sécurité alimentaire et évaluer l’impact économique de cette technologie sur le marché.
Un avenir alimentaire durable ?
L’enjeu ultime de cette avancée est de contribuer à une alimentation mondiale durable, tout en réduisant la dépendance à la viande. « Ma priorité est de diminuer la consommation de viande et de trouver des alternatives plus respectueuses de l’environnement », affirme Angenent. « En réduisant la culture d’aliments pour le bétail et en limitant les émissions liées à l’élevage, nous pourrions atténuer les effets du changement climatique. »
Cette innovation pourrait particulièrement bénéficier aux régions souffrant de pénuries alimentaires, notamment dans les zones touchées par la sécheresse. Le fait de pouvoir produire des protéines et des vitamines sans utiliser de vastes surfaces agricoles offre une solution potentielle à la malnutrition qui menace de plus en plus de populations à travers le monde.
En somme, la recherche de l’équipe de Tübingen, encore en phase de développement, ouvre la voie à une révolution alimentaire capable de répondre aux défis de notre époque : nourrir la planète tout en préservant ses ressources naturelles.
Tinhinane B