Des chercheurs de Stanford Medicine ont franchi une étape importante dans la compréhension des effets secondaires de certains traitements chimiothérapeutiques sur le cœur. Grâce à une méthode innovante de dépistage génétique, ils ont identifié un mécanisme précis à l’origine des lésions cardiaques provoquées par ces traitements et testé une solution prometteuse capable de protéger les cellules cardiaques tout en maintenant l’efficacité contre les cellules cancéreuses.
Une toxicité limitant l’usage de la chimiothérapie
Certaines chimiothérapies, bien qu’efficaces contre les tumeurs cancéreuses, entraînent des effets secondaires graves. Parmi eux, les lésions cardiaques, notamment les arythmies et la détérioration des cellules cardiaques, représentent un obstacle majeur à l’utilisation prolongée ou à forte dose de ces traitements. Ces dommages peuvent même mener à une insuffisance cardiaque, obligeant les médecins à limiter leur emploi malgré leur efficacité prouvée contre le cancer.
“Trouver une solution à cette toxicité est une priorité pour préserver la santé cardiaque des patients tout en combattant efficacement le cancer”,explique le Dr Joseph Wu, directeur de l’Institut cardiovasculaire de Stanford.
Une percée grâce à la technologie CRISPR
Pour percer ce mystère, les chercheurs ont utilisé la technologie d’édition génétique CRISPR, un outil révolutionnaire leur permettant d’étudier l’impact de milliers de gènes sur la réponse des cellules cardiaques aux traitements. Leur recherche s’est concentrée sur 2 300 gènes connus pour être ciblés par des médicaments existants.
Les cellules cardiaques étudiées, dérivées de cellules souches pluripotentes, ont été exposées à un traitement chimiothérapeutique, tandis que les gènes ont été activés ou désactivés un à un. Cette méthode a permis d’identifier un gène clé, CA12, dont l’activité est liée aux dommages causés par le traitement.
“Cette approche représente une preuve de concept pour identifier les causes génétiques des toxicités médicamenteuses,” souligne le Dr Wu.
Une solution prometteuse identifiée
Après avoir confirmé le rôle du gène CA12 dans la toxicité, l’équipe a cherché un moyen d’en bloquer les effets sans modifier génétiquement les cellules. En examinant une quarantaine de médicaments déjà existants, ils ont découvert qu’un traitement inhibant l’activité du CA12 pouvait protéger les cellules cardiaques des effets secondaires.
Lors de tests précliniques sur des souris, le médicament administré en complément de la chimiothérapie a permis de préserver la fonction cardiaque et de réduire les signes de détérioration cellulaire.
Vers de nouvelles applications
L’étude ouvre la voie à de nouvelles stratégies pour réduire les effets secondaires des traitements contre le cancer. En outre, la méthode développée pourrait être appliquée à d’autres types de toxicités médicamenteuses, offrant ainsi une solution polyvalente dans le domaine médical.
Cette recherche, soutenue par de nombreuses institutions dont les National Institutes of Health et l’American Heart Association, marque un tournant dans la manière d’aborder les défis posés par les traitements anticancéreux. Les scientifiques espèrent que ces avancées profiteront rapidement aux patients et amélioreront la qualité des soins.
“C’est une véritable révolution pour les thérapies combinées. Notre objectif est d’appliquer cette technologie à d’autres traitements et pathologies, pour maximiser les bénéfices des patients tout en minimisant les risques,” conclut le Dr Wu.
Nouhad Ourebzani