Une étude publiée dans la revue Nature alerte sur un effet inattendu de l’irradiation tumorale : l’activation d’une molécule appelée amphiréguline, qui favoriserait la dissémination du cancer.
Paru le 14 mai 2025, un article scientifique de l’Université de Pennsylvanie relance le débat sur les effets secondaires de la radiothérapie, traitement de référence pour de nombreux cancers. Selon cette étude, l’exposition des cellules cancéreuses aux rayonnements pourrait provoquer une réponse biologique contre-productive, en stimulant la production d’amphiréguline (AREG), une protéine qui joue un rôle clé dans la communication entre cellules.
Les chercheurs ont observé que cette amphiréguline, en réponse à l’irradiation, reprogramme certains lymphocytes T CD8+ — des cellules censées éliminer les cellules tumorales — en les poussant vers un état d’épuisement. Résultat : le système immunitaire devient moins apte à contrôler la tumeur, et le terrain devient favorable à l’apparition de métastases.
« Ce que nous montrons, c’est que la radiothérapie, en plus de tuer les cellules cancéreuses, peut paradoxalement créer un environnement propice à leur dissémination, en modifiant profondément les fonctions immunitaires locales », explique le Dr Andy Minn, auteur principal de l’étude.
Ces résultats ne remettent pas en cause l’utilité de la radiothérapie, mais ils appellent à repenser certaines stratégies thérapeutiques. L’une des pistes explorées consisterait à bloquer l’effet de l’amphiréguline au moment de l’irradiation, afin de préserver l’action des cellules immunitaires.
L’étude pourrait aussi avoir des répercussions sur la sélection des patients pour certaines associations thérapeutiques, en particulier avec les immunothérapies, aujourd’hui en plein essor.
Ce travail s’inscrit dans une tendance plus large de la recherche oncologique : mieux comprendre les effets systémiques des traitements, au-delà de leur cible immédiate. Il souligne la nécessité d’une vision plus intégrée de la cancérologie, où l’interaction entre tumeur, traitement et système immunitaire devient un paramètre central.
Une étude qui, sans remettre en question l’intérêt vital de la radiothérapie, invite à une plus grande vigilance scientifique dans l’optimisation des protocoles, pour éviter que le remède ne se retourne, parfois, contre lui-même.
Nouhad Ourebzani